[Communiqué de presse] Encore d’importantes inégalités entre les femmes et les hommes dans l’accès aux responsabilités supérieures, face aux discriminations et face aux violences sexistes et sexuelles.
Dans le cadre de son action en faveur de l’égalité et des parcours professionnels, le Centre National de Gestion (CNG) a mené au second semestre 2023 une enquête nationale auprès des directrices et directeurs de la fonction publique hospitalière sur l’accès aux responsabilités, les discriminations et les violences sexistes et sexuelles (VSS) : 1171 directrices et directeurs ont répondu à cette enquête, soit environ 27 % de tous les directeurs, femmes et hommes, exerçant en établissement.
Accès aux responsabilités
Parmi les répondants, 59 % des directeurs sont soit intéressés par une chefferie ou un emploi supérieur soit y ont déjà accédé : les hommes se déclarent plus intéressés (69,5 %) que les femmes (52 %). Parmi celles et ceux qui s’intéressent à ces fonctions mais ne les n’occupent pas encore, 74 % n’ont encore jamais postulé sur ces emplois. Parmi celles et ceux qui n’envisagent pas d’accéder à ces fonctions, 35 % indiquent ne pas le souhaiter pour des raisons familiales ou personnelles, 28 % car ils ne sont pas intéressés, 18 % car ces fonctions ne seraient pas faites pour eux.
D’une manière générale, les hommes D3S ou DH se sentent mieux préparés aux entretiens de recrutement que les femmes.
Dans leur exercice professionnel, les femmes (54 %) ont davantage l’impression que les hommes (47 %) de voir leurs capacités ou leurs compétences mises en doute. Indépendamment de leur sexe, les DH et les D3S ont davantage l’impression que les DS de voir leurs capacités ou compétences mises en doute.
On observe également de forts écarts de perception entre les femmes et les hommes sur divers aspects professionnels. Ainsi, les hommes pensent beaucoup moins que les femmes que le leadership puisse être différemment perçu selon le sexe du candidat par un recruteur; que les femmes rencontrent des difficultés particulières, liées au fait d’être une femme, pour leur progression de carrière ; ou qu’à compétences égales entre plusieurs candidats, la maternité réelle ou potentielle ou les aspects familiaux, peuvent constituer un frein au recrutement.
Concernant la mobilité, les hommes se déclarent mobiles sur un plus grand périmètre géographique que les femmes.
Discriminations au cours des trois dernières années
Deux types de situations ont été étudiées dans le cadre de cette enquête :
Dans le contexte professionnel en général, les directeurs se disent principalement victimes de discriminations liées à l’âge, pour 31 % d’entre eux, et de manière plus nette chez les moins de 40 ans. Viennent ensuite les discriminations liées au sexe ou à l’identité de genre, pour 28 % de tous les répondants, avec un écart très important entre les femmes (42 %) et les hommes (7 %). Elles sont également davantage ressenties chez les jeunes générations, (40 % chez les moins de 40 ans). Suivent les discriminations liées aux origines réelles ou supposées pour 11 %.
Dans le cadre de démarches pour changer de poste, les répondants se disent principalement victimes de discriminations liées à l’âge, pour 26 %, et ce de manière plus nette chez les moins de 35 ans et dans les générations ayant plus de 55 ans. Viennent ensuite les discriminations liées au sexe ou l’identité de genre pour 17 % des répondants, davantage ressenties après 45 ans. Suivent les discriminations liées aux origines réelles ou supposées pour 10 %.
D’une manière générale, pour la plupart des discriminations, les femmes s’estiment soit davantage victimes de discrimination que les hommes, soit moins certaines que les hommes de ne pas en être victimes.
Violences sexistes et sexuelles (VSS) au cours des trois dernières années
43 % des directeurs ont répondu avoir été concernés par les VSS en étant témoin de sexisme ou victime d’au moins une VSS. 70 % des hommes déclarent n’avoir été ni témoins de sexisme, ni victime de VSS, contre 45,4 % des femmes. Concernant plus spécifiquement les victimes, 29 % des directeurs disent avoir été victime d’au moins une VSS au cours des 3 dernières années, avec des écarts extrêmement importants : 42 % des femmes (303) contre 9 % des hommes (40).
Près de 900 phénomènes, qui se sont déroulés au cours des trois dernières années, ont été déclarés dans le cadre de cette enquête : 39 % en tant que témoin de sexisme et 61 % en tant que victime de VSS. Parmi les situations vécues en tant que victimes, 56 % concernent des remarques déplacées.
Les auteurs de VSS sont à 77 % un homme ou des hommes. Dans 58 % des cas, l’auteur de VSS appartient à un cercle professionnel proche de la victime : un membre de la gouvernance (médicale et de direction) (22 %), un membre de l’équipe de direction (18 %), un supérieur hiérarchique (18 %).
Les faits de VSS sont évoqués/signalés à un tiers dans 57 % des cas. Dans 3 % des cas les faits évoqués/signalés l’ont été de façon anonyme. La certitude que rien ne se passerait est une raison souvent citée pour ne pas dénoncer les faits subis. Les témoins ou victimes disent ne pas toujours avoir réalisé la gravité des faits. Lorsque le répondant est témoin, les faits de sexisme sont évoqués avec des tiers dans 74 % des cas. Pour les cas où le répondant est une victime, les faits sont peu évoqués/signalés mais plutôt gardés pour soi. Lorsqu’ils ne sont pas tus ils sont majoritairement rapportés à un collègue Le dispositif de signalement interne est très peu utilisé par les directeurs.
Parmi les faits ayant été évoqués/signalés à des tiers, dans 31,5 % des cas, l’auteur a été géré par la hiérarchie (recadrage, disciplinaire, procédure pénale, autre). Lorsque les faits évoqués/signalés le sont par la victime (exclusion de « témoin de sexisme »), celle-ci n’a connaissance de suites données que dans 13 % des cas.
37 % des victimes directes de VSS déclarent une absence de conséquence pour elles-mêmes. Les principales répercussions pour les victimes portent sur une dégradation de la relation de travail (32 %), un sentiment d’insécurité au travail (26 % chez les victimes directes de VSS), des conséquences sur la vie personnelle (15 %).
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Ces chiffres font écho aux résultats du 5ème baromètre Donner des ELLES à la santé - Janssen France par Ipsos sur la situation des médecins à l'hôpital, paru au mois de juin 2024. Cette étude souligne des discriminations persistantes avec 29 % des femmes qui se sont senties discriminées en raison de leur genre au cours des 12 derniers mois. Elle met également en évidence une perte d’intérêt pour les postes à responsabilité en particulier chez les femmes. Enfin, les VSS apparaissent comme touchant une part importante de médecins : 39 % de femmes médecins ont été victimes de comportements sexistes (allant de paroles sexistes à des agressions sexuelles), 29 % ont été confrontées à des propos sexistes sur leurs compétences, 26 % ont reçu des remarques sur leur apparence physique ou leur tenue vestimentaire et 19 % ont reçu des questions intrusives et répétées sur leur vie privée ou sexuelle ; enfin, 66 % des femmes victimes de propos sexistes ont décidé d’en parler, majoritairement à des collègues, et très peu aux référents égalité professionnelle.
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Face à ces constats, le CNG rappelle qu’il continuera de lutter avec force contre tous types de discrimination et pour l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Le CNG procède par de multiples actions pour favoriser l’accès des femmes aux responsabilités supérieures : mise en place de « marrainages », participation de directrices de la FPH au programme Talentueuses proposé par la Délégation interministérielle à l’encadrement supérieur de l’Etat (DIESE), sensibilisation des autorités de recrutement aux biais de recrutement, adaptation des lignes directrices de gestion à l’enjeu de nominations équilibrées. Le CNG rappelle l’existence de la procédure de signalement des difficultés d’exercice qui peut être utilisée pour signaler une situation dont le professionnel est victime. Le formulaire de signalement est disponible à cette adresse : Formulaire de signalement de difficulté d’exercice | Le CNG (sante.fr). Les directeurs effectuant un signalement sont contactés par un cabinet spécialisé en matière de santé psychologique au travail, qui recense et analyse les éléments ayant conduit au signalement et oriente le cas échéant le directeur vers une prise en charge adaptée. L’ensemble des signalements de difficultés d’exercice est ensuite analysé dans une commission qui se réunit tous les 2 mois environ. Cette dernière a traité 58 situations en 2023 (dont 4 VSS) et également 58 depuis le début de cette année 2024 (aucune VSS). Le CNG analyse ces signalements et les traite en lien avec le signalant, et le cas échéant, avec les ARS. Les personnes ayant effectué un signalement sont en tout état de cause recontactées.